sommaire              On ne voit que ce que l’on connaît !

Être naturaliste, c’est  être sensible aux phénomènes naturels, être en état de veille active, faire un va et vient permanent entre l’observation et la documentation. C’est avoir une démarche d’auto formation et aussi donner du sens aux événements.

 

Naturaliste ;  un terme un peu désuet ?

 Les naturalistes qui nous ont marqués dans le passé ont construit pierre après pierre l'édifice de nos connaissances actuelles. De l'astronomie à la biologie en passant par les sciences de la terre et tout  le vaste champ des sciences naturelles, nous leur devons notre vision du monde.

Ils ont tracé les voies de la science moderne, ils ont observé, analysé, classifié, synthétisé et nous ont transmis leur savoir. De Linné à  Darwin, de Goethe à  Fabre  en passant par Mendel Lorentz et Flammarion,  chacun a marqué l'évolution de la science et de sa diffusion ;      après eux, on ne pouvait plus penser comme avant !

Le Naturaliste

Certains comme Jean Fabre étaient  en grande partie autodidactes pour devenir les référents d'un savoir quasi encyclopédique sur la thématique des sciences naturelles. D’autres, armés d’une bonne culture scientifique universitaire, ont développé des capacités spécifiques par leur recherche personnelle  sur des objets différents  de leur spécialité première. C’est notamment le cas de Théodore Monod.

Jean Fabre ne s’est jamais contenté d'adopter les théories qu’avant lui d’autres scientifiques avaient publiées. Il a  soumis les assertions scientifiques à l’épreuve de l’observation du milieu naturel. Ainsi il a fait progresser nos connaissances même si parfois il a poussé sa méthode jusqu'aux limites où l'observateur, faisant partie du système qu'il observe, peut se trouver dupé et entraîné vers de fausses pistes, comme en témoignent ses controverses avec Darwin. L'histoire des sciences n'est elle pas jalonnée d'impasses ?

Novateur dans son enseignement, il a  toujours adapté sa démarche pédagogique à son auditoire faisant fi des modes d’enseignements de son époque. 

La préoccupation constante que l'on retrouve chez  les naturalistes est d'améliorer la transmission des connaissances et leur mode d'acquisition par le plus grand nombre. Ils sont généralement d'excellents  vulgarisateurs des sciences, et des pédagogues remarquables.

Dans l'approche des naturalistes comme Goethe, pour lequel la somme des connaissances acquises par l'étude de chacun des champs de la science n'est pas suffisante pour décrire et expliquer le monde, on perçoit déjà cette intuition de la complexité. Goethe doit  intégrer les apports des disciplines dans une vision unitaire du tout et c'est par l'intuition, la sensibilité, par ce qu'il nomme en français "aperçu", qu'il pense approcher "la grande harmonie de la nature". 

C'est par une démarche similaire qu'Alfred Wegener, qui n'était ni géologue, ni  géographe, ni paléontologue mais seulement reconnu comme astronome et météorologue, a fait faire un bond prodigieux aux sciences de la terre. En 1928, il écrivait en préface de sa genèse des continents et des océans :"Pour dévoiler les états antérieurs du globe, toutes les sciences s'occupant des problèmes de la terre doivent être mises à contribution. Ce n'est que par la réunion de tous les indices fournis par elles que l'on peut obtenir la vérité; mais cette idée ne paraît toujours pas être suffisamment répandue parmi les chercheurs". Certains, se sont opposés violemment à la théorie de la dérive des continents pendant près de 40 ans, . 

Les naturalistes se sont attaqués à l'étude de ce que l'on appelle aujourd'hui les phénomènes "hypercomplexes" ; un nouveau domaine scientifique  est en train de prendre forme. Il est caractérisé par des études transdisciplinaires permettant d'avoir une image globale et systémique du monde. Des disciplines telles que l'écologie, définie par Ernest Haeckel en 1866, sont une étape vers cette nouvelle voie, vers une science plus globale

Aujourd'hui, les scientifiques de haut niveau se rapprochent, ils adoptent une démarche intégrative entre disciplines ; nous pouvons avoir un exemple de ces reflexions communes en consultant les actes de certains colloques* 

Naturaliste :    Un état d'esprit

Celui qui adopte la démarche naturaliste n’est pas "un touriste scientifique", il se documente, il pousse le plus loin possible ses investigations sur le terrain, avec méthode, il vérifie  ce qu'il a lu ou entendu sur le sujet, il lui arrive même parfois de remettre en cause ou de prolonger des hypothèses faites dans les meilleurs laboratoires disciplinaires.

Sur le terrain,  il ne passe pas à côté d'un évènement parce que son attention serait focalisée sur un seul centre d'intérêt. Son cadre d’études s’élargit chaque jour. Le naturaliste compose avec la complexité, il met en évidence le lien entre les disciplines scientifiques : celui qui donne du sens. 

A force de chercher comment, il finira peut être par trouver pourquoi ; quête ultime des philosophes. 

 

 En résumé, c'est un géologue qui connaît les orchidées, un entomologiste qui s'intéresse aux champignons et un astronome spécialiste des rapaces, un photographe doué en aquarelle, ...

 

 

           Goethite (Chaillac 36) P.L.

L'état actuel  des connaissances scientifiques est tel qu'aucun être humain ne peut plus maîtriser à lui seul l'ensemble des connaissances nécessaires à l'interprétation des phénomènes naturels. Cependant les équipes pluridisciplinaires sont de plus en plus efficaces et la révolution des nouvelles technologies de l'information et de la communication permet à chacun d'avoir accès en temps réel aux bases de connaissances à l'échelle planétaire, jamais la culture scientifique n'a été aussi accessible ; profitons en.

C'est sur le terrain qu'il se révèle.

 A l’instar de Fabre qui prodiguait ses cours sur les chemins au pied du mont Ventoux, observons et écoutons les messages que nous adresse le paysage.

Les histoires des forces tectoniques qui ont érigé les reliefs, celles des glaciers et des fleuves qui passant par là ont sculpté, suivant la dureté de la matière, des vallées et des falaises mettant à nu des affleurements de roches plissées ou faillées.

Les pierres nous parlent d’un temps où sur des fonds marins, la biodiversité de l' époque s’est enregistrée dans une fine vase devenue roche, où comment des processus chimiques assistés par le métabolisme des organismes vivants ont fixé le gaz carbonique de l’atmosphère terrestre dans les roches sédimentaires.

 

 paysage

la crosseOphrys

 

Sur la lande, suivons l’aventure phylogénique des êtres vivants, leur conquête de la complexité.

Entrent en scène les végétaux ;

Des algues en passant par les mousses, les fougères et prèles jusqu’aux plantes à fleurs composées et aux orchidées, chaque palier évolutif a apporté des nouveautés pour conquérir l’espace, s’affranchir de l’eau pour la reproduction,   mieux protéger sa descendance. Développant ses stratagèmes inédits pour vivre dans un milieu  changeant, chaque espèce végétale peut raconter son histoire, elle est toujours originale et réserve des surprises et rebondissements.

 

A l’écoute du règne animal le naturaliste peut passer sa vie sans jamais être blasé. Pour trouver les solutions les plus efficientes face aux épineux problèmes de la survie des espèces, des stratégies d'une infinie diversité sont mises en œuvre par la vie organique. L’adaptation aux perpétuels changements du milieu a conduit les êtres vivants à évoluer de génération en génération. Ces évolutions successives ont conduit à cette nouvelle dimension de la complexité que représentent les sociétés d'individus. 

 

Enfin le naturaliste ne peut observer le paysage sans lever la tête vers le ciel. La vie sur la terre est directement liée au climat, lui-même est sous l’influence du soleil. Quel rôle ont joué les corps célestes  sur l’origine de la vie et sur les grands changements qui ont touché les espèces ?

 Le pas est franchi, c'est aux confins de notre système solaire qu'il faut poursuivre nos investigations ….

Diadème

Hale Bopp (P.L.)

 

Ne vous étonnez pas si un naturaliste amateur s'intéresse aux sciences de la terre, aux sciences du vivant et à l'astronomie. Il cultive aussi son jardin, observe ce qui l'entoure et photographie les instants qui passent.

 

Patrick Lachassagne

                                          janvier 2003 rev  07

                                                                                                                            

Situer ces naturalistes :

 

 

 

 

 


* Centre d'Alembere (colloque 1006 DÉMARCHES INTÉGRATIVES DANS LES SCIENCES AUJOURD'HUI)